27/02/2006Daniel MermetFrance InterPS
Retour au sommaire ACMEDIASDésinformation antisémite ?
Vendredi 24 février 2006, l'émission "Là bas si j'y suis" de Daniel Mermet, sur France Inter, a choisi de diffuser un message d'auditeur, et un seul, concernant le meurtre d'Ilan Halimi. A l'heure de l'émission, la France entière était sous le choc de cet assassinat barbare. La veille, le président Chirac s'était rendu à un office religieux et une manifestation nationale allait avoir lieu le surlendemain.

Voici la transcription mot à mot de ce que vous pouvez écouter en cliquant ici .

"Oui bonjour à tous, voilà je vous appelle à propos d'une question de vocabulaire qui me choque un peu. On a dit il y a quelques jours que pour le meurtre d'Ilan, il y aurait des circonstances aggravantes du fait que ça pourrait être un crime raciste antisémite. "circonstance aggravantes"! Ca c'est assez étrange je trouve. Ca voudrait dire que si c'est pas un crime raciste ou antisémite c'est moins grave ? C'est moins grave qu'un mec se fasse torturer pendant deux semaines et en meure si c'est pas parce qu'il était juif. Ouais ... Ben y a quand même des choses à changer peut être ?! Peut être qu'il faudrait voir que, qu'on soit juif ou pas ou qu'on se fasse agresser parce qu'on soit juif ou pas, y a pas de circonstances aggravantes, c'est un être humain qu'on a torturé, qu'il soit juif ou pas c'est pas plus grave ou moins grave. Enfin bon voilà. Voilà c'était Pauline de Dainville, salut !"

Il est impossible de savoir si cette auditrice se trompe de bonne foi, en imaginant que la loi protégerait plus les juifs que les autres citoyens (*), ou si ses motivations sont plus troubles. Par contre le bénéfice de l'ignorance ou de la bêtise peut difficilement être accordé aux journalistes de l'émission qui ont fait le double choix de diffuser à l'antenne et de ne pas apporter l'indispensable correctif.

Ce faisant ils ont commis d'une part une désinformation, par une présentation perverse de la loi 132-76 de 2003, et d'autre part, ils ont diffusé sans rectification un propos contenant un stéréotype antisémite, laissant croire aux auditeurs de cette populaire émission que les juifs seraient mieux défendus que les autres.

Daniel Mermet ignore-t-il que ce stéréotype amène logiquement à son "explication" : "c'est parce qu'ils contrôlent les gouvernements", et que les "protocoles des sages de sion" ne contiennent rien d'autre ?

(*) Cette loi concerne "toute infraction commise à raison de l'appartenance ou de la non appartenance, vraie ou supposée, de la victime à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée". Elle protège donc autant les juifs que les arabes, les noirs que les blancs, les bouddhistes que les protestants.


L'émission de Daniel Mermet est connue pour ses positions. Son présentateur, figure du militantisme de gauche- altermondialiste et pro-palestinien, a souvent été critiqué pour une répartition extrêmement dissymétrique du temps d'antenne entre pro et anti-israéliens. Ceci étant, il en est de même sur le plan politique, où il ne donne la parole qu'à des personnes de sa famille de pensée.

Il s'agit donc simplement d'une émission "engagée", n'ayant pas la volonté de présenter de débat contradictoire, mais uniquement les opinions de son animateur. On peut déplorer, pour le pluralisme démocratique, que la radio d'Etat n'ait jamais créé une émission équivalente avec des orientations inverses, mais ce n'est pas le débat d'aujourd'hui.

Daniel Mermet a été à deux reprises accusé "d'incitation à la haine raciale", et à deux reprises lavé de tout soupçon par la 17ème chambre du TGI de Paris.

En juillet 2002, premier jugement provoqué par une émission où l'on avait pu entendre qu'Israël était un "pouvoir mortifère" sachant "manier avec virtuosité le bouclier de l'antisémitisme". Que les israeliens étaient "des hypocrites qui distillent à dose homéopathique depuis 50 ans l'horrible injustice dont ils ont souffert" et que les juifs avaient "bien cultivé le capital de pitié qu'ils accumulent depuis 50 ans". Il avait consacré une émission entière à son non-lieu en septembre 2002, se disant victime de "calomnies, d'insultes", affirmant qu'on lui avait "craché au visage", dénoncant des "actes anti-médiatiques", un "chantage à l'antisémitisme", une "terreur intellectuelle", des "campagnes de dénonciations diffamatoires et de menaces", "d'intimidation de la presse", et parlant même "d'assassinat moral". Il englobait les auditeurs dans cette théorie du complot, affirmant "c'est vos messages, amis auditeurs qui étaient en cause", "VOUS êtes visés".

En septembre de la même année, seconde relaxe. La plainte était cette fois-ci provoquée par l'interview d'un ancien nazi dont les propos avaient été ... ce que l'on pouvait attendre d'un ancien nazi. Commentaires du journaliste sur ceux qui l'avaient accusé (dont la Ligue Contre le Racisme et l'Antisémitisme et l'association des Etudiants Juifs de France) : "pressions exercées par des groupuscules d'extrémistes juifs", ...

C'est donc dans un contexte assez chargé que cette nouvelle affaire intervient.
27/02/2006Daniel MermetFrance InterPS
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