12/07/04 | Tom Grass | Sunday Telegraph | JDK |
Retour au sommaire ACMEDIAS | Profondément viciée | Cet article, paru dans NRO , résume bien la situation journalistique au proche-orient : les informations non vérifiées issues de pigistes palestiniens, les titres magouillés pour des lecteurs trop pressés, le vocabulaire biaisé et les décomptes trafiqués ... Son auteur, Tom Grass, a été correspondant du Daily Telegraph à Jerusalem. Complément important : Reuters a été, en septembre 2004, gravement désavoué par un grand groupe de presse Canadien et la réaction de l'agence de presse est un aveu pur et simple : les journalistes s'auto-censurent par peur de groupes armés ! Ne manquez pas la traduction française d'un article de l'association Honest Reporting disponible sur le site de l'UPJF Beaucoup de gens considèrent encore Reuters comme la Rolls des agences de presse. [...] De nos jours, toutes les grandes sociétés de média du monde sont abonnées à Reuters. Reuters, qui travaille dans 200 villes de 94 pays, produit des nouvelles en 19 langues, de même que des photos et des vidéos du monde entier. Bien que l'agence donne des rapports neutres sur beaucoup de questions, la couverture par Reuters du Moyen-Orient est profondément viciée. Il est symptomatique que, par exemple, le responsable mondial des nouvelles chez Reuters, Stephen Jukes, ait banni l'utilisation du mot "terroriste" pour décrire les attaquants du 11 Septembre. Et malgré tout, le prestige de Reuters est tel que les rédacteurs d'informations, de Los Angeles à Auckland, supposent automatiquement que le texte, les photos, et les vidéos fournis par Reuters seront loyales et objectives. La copie provenant de Reuters et d'Associated Press est tout simplement insérée dans les rapports de beaucoup de correspondants, même dans le New-York Times et le Washington Post, apparemment sans se poser, la plupart du temps, de questions sur sa validité. Ceci a conduit à des rapports fallacieux sur l'Irak, et à une couverture encore pire du conflit israélo-palestinien. Les cables d'agence ont bien plus d'influence pour établir les nouvelles, et par conséquent l'évolution diplomatique de cette bataille que ce que croient la plupart des gens. Un correspondant américain à Jérusalem, un homme expérimenté souhaitant garder son anonymat de façon à ne pas ruiner ses relations avec ses collègues anti-israéliens signale: "alors que les correspondants étrangers continuent à écrire des articles de fond, il est rare qu'ils couvrent les nouvelles de dernière heure qui dominent le conflit israélo-palestinien. Si l'on considère les nouvelles écrites de ce conflit, j'estimerais que 50% des reportages et 90% de l'attitude sont formés par les agences de presse. Ce qui est important, c'est que Reuters définit le ton et ici, tout est dans l'influence. L'an dernier, dans une étude, l'observateur vigilant des médias "Honest Reporting" a trouvé que dans 100% des titres de Reuters sur les violences israéliennes, le premier mot de la phrase était Israël, ce qui le soulignait; aussi, la voix active était utilisée sans expliquer que la "victime" pouvait avoir été armée. Un titre typique était "Des soldats israéliens tuent un Palestinien en Cisjordanie" (3 Juillet 2003)'. En revanche, quand des Palestiniens attaquaient des Israéliens (presque toujours des civils), Reuters évitait d'habitude de nommer l'auteur. Par exemple "Une nouvelle fusillade en Cisjordanie trouble la trève" (1er Juillet 2003). Dans beaucoup de cas, le titre est mis à la voix passive. C'est souvent une question de mise en évidence: l'information importante et pertinente est, de fait, contenue dans le texte de Reuters, mais elle est enterrée profondément dans l'article. Beaucoup de lecteurs de journaux, cependant, ne vont jamais plus loin que les titres, et pour des raisons de place, beaucoup de journaux ne gardent que les quelques premiers paragraphes d'un rapport souvent inséré dans le papier de leurs propres correspondants. Quand les réseaux de télévision donnent des brèves, ou font passer le fil Reuters en bas de l'écran, le texte complet n'est jamais montré. Parfois, Reuters présente une information non fiable comme si elle était incontestablement vraie. La plupart des gens ne s'en apercevront vraisemblablement pas. Par exemple, Reuters citera "un médecin de l'hôpital qui a dit que le Palestinien blessé n'était pas armé", alors que le médecin ne pouvait pas le savoir, puisqu'il n'était pas présent lors de la fusillade. Mais comme c'est un médecin, Reuters suggère aux lecteurs que sa parole fait forcément autorité. Mlaheureusement, les titres et le texte de Reuters sont utilisés sans changement par les rédacteurs des journaux, parce qu'ils pensent qu'il s'agit de texte donné professionnellement, d'une façon équilibrée, qui n'a pas besoin d'être revu. Les reporters ne peuvent bien évidemment être partout à la fois. La vitesse de l'internet et la demande de nouvelles 24 heure sur 24 signifient que les médias du monde se reposent sur Reuters et AP, qui quant à elles, se reposent sur un réseau local de pigistes palestiniens. Pratiquement toutes les dernières nouvelles (et beaucoup des autres) sur CNN, la BBC, et d'autres réseaux, proviennent de ces pigistes. Ces pigistes sont recrutés pour assurer la vitesse, pour faire des économies (pas besoin de chauffeurs et de traducteurs) et pour leur connaissance du terrain. Mais dans bien des cas, ce sont plus leurs liens avec le régime d'Arafat ou avec le Hamas qui comptent que leurs capacités journalistiques. Trop souvent, les informations qu'ils fournissent et les témoins supposés qu'ils interrogent, ne sont pas fiables. Cependant, à cause du prestige d'Arafat, les médias américains et internationaux considèrent que leut copie est factuelle. Ainsi des non-massacres deviennent des massacres; les comptes de victimes sont exagérés, et on parle d'hommes armés comme si c'était des civils. Comme le dit Ehud Ya'ari, le meilleur expert de la télévision israélienne en affaires palestiniennes: "La majeure partie de l'information en tout genre qui vient de la région est filtrée par des yeux palestiniens". Les caméras sont dirigées de manière à montrer une vue déformée des actions de l'armée israélienne et ne se s'intéressent pas aux palestiniens armés. Les rapports écrits se concentrent sur la version palestinienne des évènements. Et même les Palestiniens qui n'appuient pas l"Intifada n'osent montrer ou décrire rien de gênant pour l'autorité palestinienne, de peut de provoquer la colère des forces de sécurité d'Arafat. Un journaliste Palestinien m'a dit que "le pire que les israéliens puissent nous faire, c'est de nous retirer nos cartes de presse. Mais si nous fâchons Arafat ou le Hamas, nul ne sait qui allons trouver dans notre cuisine en rentrant le soir à la maison" Certains des pigistes palestiniens sont honnêtes et courageux. Mais suivant des anciens de Reuters, ils ressentent la présence intimidante de Wafa Amr, la "Correspondante Principale Palestinienne". Mme Amr, qui est une cousine de l'ancien premier ministre palestinien Nabil Amr, et dont le père est, paraît-il, proche d'Arafat, a vu ce titre créé rien que pour elle (il n'y a pas de "Correspondant Principal Israélien", ou l'équivalent dans aucun autre pays arabe), afin que ses liens de proximité avec l'autorité palestinienne puissent être exploités. Comme un ancien journaliste de Reuters le dit: "Elle occupe ce poste, en dépit de son ignorance des bases de la grammaire anglaise. L'information passant par elle est contrôlée, orchestrée. Au grand jamais, Reuters ne permettrait à la propagande du gouvernement israélien d'entrer ainsi dans ses reportages. Et, de fait, les articles exposant les méfaits d'Israël font les bonnes feuilles de Reuters. Mais Mme Amr n'a jamais écrit sur Arafat ou son groupe terroriste des brigaldes d'Al-Aksa." Peut-être que les choses sont en train de s'améliorer. Récemment, sous la responsabilité d'un nouveau chef de bureau à Jérusalem, Reuters a pris quelques mesures pour mieux équilibrer la copie. Par exemple, on ne dit plus que le but du Hamas est simplement "d'établir un état indépendant en Cisjordanie et à Gaza" (ce qui est faux), mais écrit que le Hamas "a juré la destruction d'Israël" (ce qui est vrai). Reuters ne tient plus la comptabilité trompeuse des décès à la fin de chaque article, laquelle comptait ensemble les civils palestiniens, les hommes armés, et les bombes humaines (l'Agence France-Presse continue ce compte). Et apparemment, il y a un projet pour muter Wafa Amr d'ici l'an prochain. Est-ce trop d'espérer qu'un de ces jours prochains, Reuters pourrait appeler le terrorisme "terrorisme" ? | |
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